L’intérêt des autorités africaines pour le Covid-Organics – médicament de traitement amélioré à base des plantes fabriqué à Madagascar avec, entre autres, Artemisia et destiné à la prévention ainsi qu’au traitement du Covid-19 – ne cesse d’accroître. Le Congo-Brazzaville vient de réceptionner un lot de ce produit.
Le professeur Jean-Paul Ngbolua Koto-te-Nyiwa, ancien chercheur de l’Institut Malgache de Recherches Appliquées (IMRA) où Covid-Organics a été fabriqué nous en parle. Il estime que « l’IMRA dispose des chercheurs hautement qualifiés et des équipements de recherche de troisième génération pour des recherches de haut niveau dont les résultats ne peuvent souffrir de contestations. »
Docteur en sciences biologiques de l’Université de Kinshasa et de l’IMRA, Jean-Paul Ngbolua Koto-te-Nyiwa enseigne à la faculté des sciences de l’Université de Kinshasa. Il est aussi le recteur de l’Université de Gbado-Lite, chef-lieu de la Province du Nord Ubangi.
Que faut-il retenir de l’Institut Malgache des Recherches Appliquées du Madagascar ?
L’Institut Malgache des Recherches Appliquées (IMRA), structure où j’avais effectué mes recherches en 2010 dans le cadre de ma thèse de doctorat est une œuvre de la Fondation Albert et Suzanne Ratsimamanga. C’est une association reconnue d’utilité publique à but non lucratif située dans le quartier Avarabohitra Itaosy à Antananarivo, au Madagascar.
C’est un Centre régional de recherche de l’Union Africaine (UA) qui a été créé en 1957 par le Professeur Albert Rakoto Ratsimamanga (avant la fondation de l’Organisation de l’Unité Africaine en 1963) grâce à ses moyens personnels provenant des royalties des médicaments qu’il avait découverts au cours de sa carrière scientifique et qui ont été mis sur le marché international (CORTINE NATURELLE, MADECASSOL, PATELEN, SURELEN, MADEGLUCYL, etc.). Actuellement, l’IMRA est compté parmi les centres biopharmaceutiques qui disposent dans leurs catalogues près de 50 médicaments développés à base de plantes de Madagascar. A ce titre, l’on est en droit d’affirmer que l’IMRA a les moyens de ses ambitions.
L’IMRA est un Centre biopharmaceutique qui a pour missions : la recherche sur les plantes médicinales et la Médecine Traditionnelle de Madagascar, le développement des médicaments adaptés aux moyens économiques de la population en se basant sur les évidences scientifiques ; la promotion des activités de formation des étudiants nationaux et étrangers. Ce centre est donc un patrimoine africain.
Comment pouvez-vous décrire les conditions dans lesquelles Covid-Organics a été fabriqué ?
Il y a lieu de préciser que cette découverte est 100% malgache et que tout chercheur national ou étranger qui effectue ses recherches à l’IMRA, est lié par un contrat de confidentialité. Voilà pourquoi il est une nécessité pour chaque Etat de valoriser les recherches scientifiques par son savoir endogène.
Néanmoins, il faut noter que l’IMRA dispose des chercheurs hautement qualifiés et des équipements de recherche de troisième génération pour des recherches de haut niveau dont les résultats ne peuvent souffrir de contestations.
Vous plaidez aussi pour la valorisation des plantes médicinales congolaises, celles du Nord Ubangi en particulier. Quelle leçon tirez-vous de Covid-Organics ?
Covid-Organics est un MTA (Médicament Traditionnel Amélioré) obtenu à base de plantes médicinales. Il est mis au point dans un laboratoire malgache pour les malgaches d’abord et le reste du monde ensuite. La biodiversité congolaise a déjà offert des plantes médicinales qui ont été testées dans les laboratoires de l’IMRA à Antananarivo et ont prouvé leur efficacité et dont la valorisation devra se faire par des chercheurs qui y ont mené des recherches et ont effectué des travaux scientifiques (Thèses). Ces derniers constituent une main-d’œuvre qualifiée pour toutes fins utiles.
Ainsi, la leçon à tirer du Covid-Organics est que les pays africains doivent comprendre que toutes les matières premières pour le nucléaire, l’informatique, l’électronique, l’aéronautique, etc. se trouvent en Afrique. 60 ans après « indépendance », l’Afrique dispose désormais d’un certain nombre de docteurs à thèse (PhD) formés dans les meilleurs Ecoles et Académies qui, en vertu du principe de transfert des connaissances et des technologies, doivent transformer nos potentialités en richesses. Car le rapport des forces de l’Afrique avec les autres régions dépendra de sa capacité et de son ingéniosité, comme le disait un économiste belge, Michel Norro, : « L’Afrique dispose des hommes, des ressources naturelles et des atouts nécessaires pour son développement ; l’Afrique a les moyens de ses ambitions. »
Pour ce faire, la RDC à l’instar du Madagascar, doit croire en ses propres chercheurs et valoriser la biodiversité végétale congolaise qui servirait à combattre non seulement le Coronavirus, mais également d’autres maladies épidémiques, endémiques et/ou pandémiques qui existent (malaria, drépanocytose, diabète, cancer, etc.) ou qui pourraient s’annoncer éventuellement.
Par conséquent, il y a nécessité et urgence qu’il soit créé en République Démocratique du Congo un grand Centre de Recherche Biopharmaceutique à l’instar de l’IMRA, ayant des antennes dans toutes les provinces du pays, qui remplissent les mêmes missions que l’institut malgache et qui explorent la biodiversité végétale pour son bon fonctionnement.
S’agissant de la province du Nord Ubangi, elle constitue une éco-région dont la biodiversité a fait l’objet d’un Projet « Ubangi BioXplore ». C’est une banque de données porteuse des solutions. Ceci est une manière de valoriser le savoir endogène dans le domaine sanitaire dont les résultats de recherche seront incontestablement basés sur des évidences scientifiques.
La Pandémie du Covid-19 dans ses conséquences multidimensionnelles a fait naitre dans le chef de tous les dirigeants du monde une prise de conscience collective. Puissions-nous remercier le gouvernement congolais à travers son ministère de la recherche scientifique et innovation technologique pour les efforts combien louables fournis dans la mise en place d’une Commission regroupant des scientifiques congolais qui sont à pied d’œuvre pour une solution congolaise.
Propos recueillis par Jean René Kule Kongba